Interview coup de cœur KISSCITYMAG 2015
Interview coup de cœur Jérémie Gordien RAVAHIMANANA,

Consul Honoraire de Madagascar
"je dois promouvoir la destination de Madagascar auprès des habitants du Grand- Ouest de la France
en valorisant les nombreux atouts dont regorge le pays"
C’est confortablement installé à la terrasse de sa Résidence herblinoise, entourée de palmiers, d’oliviers et d’un néflier que le Consul de Madagascar m’accueille pour un entretien privé où il livre avec générosité sa vision de l’île rouge. Entre développement, musique et traditions, l’île-continent fascine les adeptes du green tourisme.
Bonjour Monsieur RAVAHIMANANA, vous êtes Consul honoraire de Madagascar à Nantes, il en existe 7 en France et vous êtes le seul d’origine Malgache. Comment avez-vous accédé à cette fonction ?
Je suis Nantais d’adoption depuis 1982, j’y ai poursuivi mes études juridiques pour préparer mon cursus licence- maîtrise-doctorat. En 1989 j’ai créé l’association Vahy France Madagascar pour promouvoir les échanges Franco-Malgaches. Pendant cette période j’ai organisé de nombreuses manifestations culturelles, artistiques, touristiques et économiques. J’ai contribué ainsi à la création de la ligne maritime entre le Port de Nantes-Saint Nazaire et le 1èr Port international malgache, Toamasina. Mon engagement pour Madagascar m’a incité tout naturellement à postuler à la fonction de Consul honoraire, qui est une mission diplomatique dense et noble.
Quel est votre rôle ?
Mon rôle est de faire connaitre la richesse patrimoniale et artistique de Madagascar à travers différentes manifestations évènementielles. Ma juridiction est composée de 13 départements qui s’étendent de Brest à la Rochelle et de Nantes à Laval. La fonction d’un consul honoraire est de protéger et aider ses compatriotes, pour cela je procède à la traduction et à l’authentification des actes d’état civil et j’interviens pour l’obtention des visas courts et longs séjours à destination de Madagascar. J’ai aussi un rôle de conseil auprès des entreprises ou particuliers qui veulent passer leur retraite, investir à Madagascar afin de les renseigner sur les aspects juridique, fiscal et social. L’objectif est de faciliter leurs démarches administratives comme la création d’une entreprise ou d’une association humanitaire, préparer un mariage, ect.
Consul honoraire signifie que vous ne percevez pas de rémunération, quel métier exercez-vous en parallèle ?
J’exerce le métier d’Assureur conseil dans un grand groupe international, dans le domaine de gestion d’actifs et de patrimoine.
A l’heure du commerce équitable et du green business quels sont les produits locaux plébiscités par les Européens ?
Madagascar est le premier pays producteur de vanille au monde. Café, girofles, cacao, cannelle y sont aussi produits. Depuis une quinzaine d’années les acteurs économiques ont adhéré à un nouveau système de commerce équitable pour aider les agriculteurs à développer une production plus éthique et durable. Le but est d’apporter un savoir-faire pour l’exportation. Dans l’objectif de préserver la culture biologique, Madagascar reste encore dans un processus de production artisanale.
En mai dernier 1,7 milliard de barils de pétrole lourd ont étés trouvés dans le gisement de Tsimiroro, dans l’ouest du pays à Morondova. Quelles perspectives économiques représente cette découverte pour le développement de Madagascar et la vie de ses habitants?
Madagascar traversait une crise politique profonde depuis 5 ans, grâce à l’élection du nouveau Président, qui a été élu démocratiquement par le peuple Malgache, le pays a retrouvé son équilibre. J’ai assisté à l’investiture du nouveau Président au mois de janvier, où il a énoncé ses priorités concernant le retour à l’état de droit, l’éradication de la pauvreté et de la corruption. Son engagement favorise le développement économique de Madagascar, qui est un pays d’avenir, dont les sous-sols regorgent de pierres précieuses et de pétrole noir comme vous l’avez souligné.
Quels sont les atouts de Madagascar ?
Madagascar dispose de ressources naturelles minières très importantes comme le pétrole noir, indispensable pour la fabrication des produits électroniques. Côté produits de la mer, les crevettes et langoustes sont très réputées, tout comme la production de vanille, de café et de riz, dont les Malgaches sont les premiers consommateurs au monde. Ses plages idylliques en font aussi une destination très prisée.
Existe-t-il un tourisme de luxe à Madagascar ?
Oui, des agences spécialisées proposent de très belles prestations à la carte, comme la découverte des pics de montagne Tsingy qui se situent sur la côte ouest de Madagascar, à Morondava ou encore la visite d’Isalo sur la nationale 7, vers le Sud. Du côté Est, l’Ile de Ste Marie offre un spectacle de baleines pendant le mois d’août. De nombreuses manifestations naturelles et exceptionnelles séduisent les touristes. En outre, la population malgache est un peuple doux, souriant, chaleureux et qui aime accueillir les gens.
Comment se développe l’entreprenariat à Madagascar ?
Le défi du pouvoir actuel est de développer l’économie en s’appuyant sur la formation, pour éradiquer le chômage des jeunes, et les former à l’apprentissage d’un métier, grâce à la création d’instituts d’études commerciales, universités scientifiques ou écoles informatiques pour le web. Des entreprises étrangères commencent à s’installer à Madagascar et non dans les pays avoisinants (Ile Maurice, Seychelles, ile de la Réunion, les Comores) car la population malgache, composée de jeunes actifs, représente une main d’œuvre qualifiée, à faible coût.
Comment vivent les jeunes Malgaches au quotidien et quelles sont leurs perspectives d’avenir ?
Très dur, car la plupart des jeunes n’ont pas forcément accès à la formation. C’est un problème de base puisque malgré la création d’écoles dans les grandes villes, beaucoup ne peuvent poursuivre leurs études faute de moyens. Donc de nombreux jeunes veulent sortir du pays pour avoir une meilleure situation. Mais j’insiste sur ce point : il faudrait qu’il existe un système d’aide pour inciter les jeunes à rester et à faire leurs études sur place pour pouvoir préparer leur avenir.
On parle beaucoup du phénomène d’ « exode à l’envers ». Constatez-vous un retour au pays des enfants originaires de Madagascar ?
La première génération qui était arrivée en France était issue des milieux favorisés, enfants de militaires ou de médecins qui souhaitaient poursuivre des études. Ceux-là ont eu la chance d’avoir une culture plus francophone. A un certain moment il est important de penser à un retour aux sources. Un dicton dit que lorsqu’on ne sait pas où on va, il faut retourner d’où on vient. C’est difficile de retourner dans son pays d’origine lorsqu’on a vécu longtemps moment en France. Il faut une intégration, voir même une réintégration, et une bonne préparation psychologique, car on ne peut pas faire un copié-collé de ce que l’on a vécu en France. Il faut s’adapter aux réalités locales. Cependant, on assiste à un retour depuis quelques années de familles malgaches qui veulent apporter leur contribution et leur savoir-faire au développement de leur pays. D’autant plus qu’ils connaissent les compétences des jeunes qui sont déjà sur place.
Quels liens entretiennent vos enfants avec la culture Malgache ?
J’ai 3 enfants, dont une fille qui suit le même cursus que le mien (sourire) et deux garçons qui sont encore étudiants. Tous sont attirés par leur pays d’origine. Ils ont parcouru Madagascar du Nord au Sud. Dotés d’une double culture, nous leur avons transmis les valeurs traditionnelles malgaches comme l’Amitié, le Respect et l’Entraide (le Fihavanana, Fanajana, Fifanampiana). Dès leur plus jeune âge, ils ont participé à de nombreuses manifestations culturelles et artistiques malgaches pour découvrir les chants et danses traditionnels du pays, notamment la célébration du 50ème Anniversaire de l’Indépendance de Madagascar où de nombreuses stars internationales malgaches sont venues à Nantes.
Quels sont les projets de développement à moyen et long terme au niveau touristique ?
Il est rare de trouver une destination touristique que l’on puisse qualifier d’authentique. Lors de mes nombreux voyages, j’ai pu constater deux tendances : soit le tourisme de masse ou tourisme industriel, avec la construction de buildings et de béton, ou le tourisme durable favorisant la protection de la nature. Madagascar s’inscrit dans un tourisme durable. La politique actuelle du pouvoir est de trouver un équilibre naturel car Madagascar dispose de richesses endémiques au niveau de la biodiversité des plantes et des animaux. L’objectif est de faire venir d’ici 5 ans 500 000 visiteurs par an. Actuellement la plus haute fréquentation depuis 20 ans est de 300 000 visiteurs annuels. Pour cela je dois promouvoir la destination de Madagascar auprès des habitants du Grand- Ouest de la France en valorisant les nombreux atouts dont regorge le pays, comme les plongées sous-marine, la pêche au gros à Diégo-Suarez, la découverte des petites îles de toute beauté, comme Nosy Be.
Quelles sont les associations les plus actives ?
Depuis des années, Madagascar dispose d’une structure associative d’envergure européenne, voir internationale. Par exemple, la RNS (Rencontre Nationale Sportive) favorise l’amitié et la compétition dans le sport. Sa 34ème rencontre s’est déroulée à Nantes sous le parrainage de Mr Jean Marc Ayrault, alors député et ancien Maire de la Ville de Nantes. Sur le plan régional, de nombreuses associations culturelles, sportives et humanitaires œuvrent efficacement dans l’éducation, la formation et la promotion sociale en particulier Vahy France Madagascar. Enfin, une nouvelle association Nantaise s’est créée, Madagascar Mihaso Mada’Mi, présidée par Alienor Maussion, qui a pour objectif de renforcer les liens et échanges entre les jeunes franco-malgaches du grand-ouest de la France. Cette association a organisé une soirée d’inauguration pour la découverte de Madagascar dans le Pays de Retz, au Domaine du Petit Marais (Arthon en Retz) le 15 novembre dernier. L’ambiance y était festive et conviviale. Les convives ont pu apprécier les sonorités des instruments de musiques traditionnels comme la Valiha et le Kabosy.
Quelles sont les personnalités emblématiques de Madagascar en France?
Dans les années 60 le groupe Les Surf ont fait un tabac au niveau de la scène musicale internationale, comme les chanteurs Bodo, Dama Mahaleo, Jaojoby, Fenoamby, Poopy, Jerry Marcos, Eric Manana, Justin Valiha, les frères Rabeson ou l’accordéoniste Régis Gizavo. Dans d’autres domaines, on peut distinguer le poète Dox, le Directeur général de l’école HEC de Paris, Bernard Ramanantsoa, le professeur Raymond Ranjeva, Juriste international, Vice-président de la cour internationale de justice, Docteur honoris causa des Universités de Strasbourg et Limoges. Et le célèbre peintre Andrianaivo Ravelona…Saluons également les succès des deux Nantaises, Floria Guei et Agnès Raharolahy, relayeuses du 4x400 mètres qui ont reçu la médaille d’or aux championnats de Zurich ce 17 Aout dernier. Enfin, la nouvelle génération connaitra surement l’attaquant du FCN, Rabetsimialona Tsihoarana, qui joue dans les moins de 18.
Infos & Contacts:
www.consulat-madagascargrandouest.fr
Quartier Monselet, 6 Place SARRADIN, 44 000 NANTES
09 71 27 66 57